Les entreprises sociales pourraient être bien plus nombreuses qu’on ne le pense…

Des entreprises sociales diverses
Il est souvent admis que 10% des travailleurs en France sont embauchés dans le secteur de l’Economie Sociale et Solidaire. Il est vrai que « l’ESS » réunit aujourd’hui la carpe et le lapin. En effet, quoi de commun entre les grandes coopératives agricoles ou de distribution, les fondations d’entreprise, les associations sportives, les chantiers d’insertion ou les sociétés capitalisées à statut ESUS ?
… Pas grand chose.
Il n’en reste pas moins qu’elles assurent un minimum de valeurs et de principes que ce soit en termes de gouvernance (démocratique), de gestion (réserves obligatoires) ou d’impacts (utilité sociale et environnementale). Et pour cela, elles sont attractives pour leurs clients et partenaires et pour les nouveaux talents qui sortent des écoles y compris les plus prestigieuses.
Un secteur privé qui essaie de s’adapter
Le secteur privé traditionnel, pour simplifier les « sociétés anonymes », tentent de faire bonne figure sous la pression de leurs parties prenantes. Les clients choisissent des productions plus durables, les territoires demandent des comptes, les salariés s’interrogent sur le sens de leur travail et celui de leur entreprise…
L’entreprise se trouve confrontée à la baisse d’attraction de ses offres d’emplois, à la nécessité de se réinventer pour répondre aux marchés publics à clause d’insertion, à tenir compte de sa responsabilité dans le développement du territoire, à intégrer des travailleurs fragiles, …
Sinon à voir une concurrence plus responsable à lui faire concurrence : le développement d’offres et de labels locaux, d’entreprises éthiques partageant la valeur produite, de productions agricoles alternatives qui deviennent centrales,..
Elle a inventé la Responsabilité Sociale et Environnementale ne laissant à personne, sinon à elle-même, le loisir de décider des domaines dans lesquels elle se fixait des objectifs de progrès, les indicateurs associés et bien sur les contrôles à effectuer. Tout cela trompant effectivement bien peu de monde. Il y a aussi la rédaction des « raisons d’être », les entreprises à mission, les collaborations avec les acteurs de l’ESS, … tout cela n’en fait pas des acteurs de l’économie sociale et solidaire mais crée un flou.
Lire à ce propos notre article :
Accompagnons les PME à s’inscrire dans l’ESS !
A contrario, il y a dans le tissu entrepreneurial des milliers d’entreprises qui partagent bien plus d’objectifs et de façons de faire avec le monde de l’ESS qu’avec les grandes entreprises privées. Des milliers d’entreprises qui « font de l’ESS » sans le savoir : des entreprises intégrées dans leur territoire qui privilégient les achats auprès de fournisseurs locaux, qui embauchent des travailleurs fragilisés, qui font participer leurs salariés et leurs parties prenantes aux instances décisionnelles, qui dépassent rarement un écart de rémunération de 1 à 7, qui privilégient l’investissement au versement de dividendes… Bref qui font de l’ESS comme Monsieur Jourdain faisait de la prose. Ces sociétés en réalité n’ont rien d’anonymes.
Elles sont incarnées par des chefs d’entreprise qui appliquent sans le savoir mais avec bon sens les préceptes de l’ESS : Plus de participation, plus de transparence, plus de partage de la valeur, plus d’intégration, plus d’attention au territoire et à l’environnement.
Car le moteur de leur entreprise n’est pas l’appât du gain mais une envie, un besoin de construire un projet durable et qui a du sens pour eux et donc sans doute un peu aussi pour les autres.
A l’heure où les grandes entreprises et leurs représentants savent faire pression sur nos gouvernants pour une économie toujours plus libérale et moins redistributive, l’Economie Sociale et Solidaire doit intégrer ces milliers d’entrepreneurs locaux davantage en prise avec les aspirations des citoyens. Leur rôle sur la redynamisation des territoires est essentiel. Leur capacité a s’inscrire dans un écosystème durable et leur impact social sont sans comparaison.
Bien sur toutes ne remplissent pas tous les critères, et il faudra accompagner, à la marge, leur transition. Mais c’est en réussissant cette intégration que l’ESS, pèsera sur les décisions économiques et sociales de nos dirigeants pour une économie plus inclusive.
Par Pierre Richard.